Une journée qui commence très mal pour l'héritier des Yamazaki. Dès le matin voilà une belle dispute avec son père. Habituellement, il entretient de très bonnes relations avec ses parents, mais vu qu'il a une grande gueule, et que tel père tel fils, quand ça fusait entre les deux, cela finissait toujours mal. Shiro s'était donc rendu en cours très énervé, en râlant à son petit frère Shun, lui disant à quel point par moments, leur paternel pouvait être chiant. Et bien sûr, à la première heure de cours, telle fut sa surprise quand le professeur leur dit qu'il y'avait ce matin même, une interro très importante. En effet, il avait complètement oublié... Il se laissa tomber sur sa chaise, telle une masse, en poussant un gros soupir. Il n'avait même pas eu le temps d'ouvrir ses cours ce week-end question de réviser un peu. C'était un week-end assez stressant... Il avait encore passé la nuit chez son best friend, Hajime plus précisément, et ce dernier n'avait pas du tout la pêche. Du coup, ils n'avaient pas beaucoup dormis, il fallait impérativement lui changer les idées et Shiro avait insisté pour le faire sortir en boite, aller prendre un verre, prendre l'air...

Une bonne demie heure plus tard, Yamazaki se trouvait devant une feuille à moitié blanche. Rhaaaa... Il ne fallait pas rêver, cette interro était juste fichue, il aurait une sale note, et cela ne l'enchantait pas. Bien sûr, ce genre de situations ne lui arrivaient pratiquement jamais, mais Shiro avait horreur de faire partis des derniers. Il donnait beaucoup trop de valeur à sa personne pour ça... Voilà une raison de plus pour le mettre vraiment en rogne.

-Chikusho... (merde)

Quand la cloche sonna, c'est à dire deux heures après, le jeune homme grimaça, ça y'est, il devait tout rendre. Eh bien tant pis hein... Alors qu'il rangea ses affaires et commença à descendre les marches de l'amphi, son voisin le rejoint et entama la conversation.

-Alors, avec Egawa, comment ça se passe ?

Shiro détourna la tête et poussa de nouveau un soupir.

-Nani, pourquoi tu me demandes ça d'un coup.

Ce n'est pas comme s'il avait envie d'en parler, franchement... Pourquoi tout le monde lui demandait toujours où il en était avec Sayumi... Cela commençait à être embêtant, ils ne savaient même pas ce qui s'était passés. Et ils ne le sauraient jamais, ça non.

-Je sais pas, y'a des gens qui racontent qu'elle est devenue la copine de ce type là, tu sais, argh, comment il s'appelle déjà...

Shiro s'arrêta en plein milieu des escaliers, son cœur manqua un battement. Quoi ? Sayumi ? Devenue la copine de ? Il fixa son camarade à l'attente d'un nom, il voulait savoir qui était ce type qui touchait à l'élue de son cœur.

-Ah ! No Kan, voilà, l'acteur Coréen !

Si Shiro avait été un caméléon, il serait certainement devenu plus blanc qu'l ne l'était. Impossible. Il avait du mal entendre. Un sourire forcé se dessina sur ses lèvres.

-Qui ça... ?

-No Kan, ouais. Pourtant c'est une Queen... Elle est pas sérieuse en fait.. Bref, je dois y'aller, jaa na !

Shiro suivit du regard son pote descendre les escaliers, donner ses copies et s'en aller. Cette fille. Cette Sayumi. En couple avec Kan. CE No Kan. Elle savait très bien à quel point Shiro ne pouvait pas le piffrer. Mais elle l'avait fait. Une vengeance ? Si c'était le cas, elle ne tarderait pas à avoir des nouvelles de son ex.
Carrément à bout, Shiro quitta l'amphi sans même rendre son interro au professeur. Il dévala les escaliers pour se rendre dans la cour, et une fois dehors, il chercha la Reine du regard. Il demanda à certaines Nippones qui étaient dans les parages, et quand elles pointèrent du doigt le Coin Coréen, Yamazaki crut défaillir. Elle était là-bas, debout, en train de discuter avec quelqu'un. Une plaisanterie. Ce devait être une plaisanterie. Il s'approcha davantage, et sans même donner un regard aux Coréen, il saisit le bras de la jeune fille brutalement, et l'éloigna un peu des autres. Une fois plus loin, il commença la conversation.

-Je peux savoir ce que tu fabriques ?

Depuis combien de temps il ne lui avait pas adressé la parole... Depuis le jour même où elle lui avait annoncé qu'elle avait avorté comme prévu... Ce lendemain là où il l'avait quitté...

-Qu'est-ce que tu fou chez les Coréens ?!

Les bras croisés, la tête légèrement penchée en avant, prête à tomber, les yeux à moitiés clos, la jeune femme se retenait de ne pas bailler et de s’endormir sur sa table. Histoire de l’art. Franchement, il y avait des cours plus palpitants, non ? D’habitude, elle aimait ce cours, mais après seulement 4h de sommeil, elle avait plus envie de se pendre qu’autre chose. Elle soupira le plus silencieusement possible et s’affaissa un peu plus dans son siège, regardant rapidement les diapos que passait le prof. Sa voix monotone n’arrangeait pas du tout les choses. Elle releva brusquement la tête à l’entente d’un bruit sourd, la tournant par la suite, comme tous les autres élèves, vers l’origine du bruit. Un élève s’était endormi et sa tête avait heurté sa table. À la vue du jeune homme se frottant le front en grimaçant, la demoiselle se redressa, voulant éviter que cela se reproduise avec elle. Enfin motivée pour prendre son cours, elle attrapa un stylo et au moment où elle allait écrire, le cours venait de se finir. Ok. Bon, il ne lui restait plus qu’à ranger ses affaires, elle interpella aimablement sa voisine nippone, qui trop heureuse que Sayumi lui adresse la parole, lui prêta volontiers son cours afin qu’elle puisse le rattraper. La Queen la remercia en souriant et sortie de la salle, évitant des élèves qui attendaient de pouvoir rentrer dans l’amphi pour le cours suivant.

Marchant tranquillement entre les bâtiments, elle sortie son téléphone et commença à converser avec Anna par sms. Cette dernière s’inquiétait un peu, elle avait bien remarqué que Sayumi était différente depuis sa rupture avec Shiro, bien sûr, elle savait pourquoi, elle était même la seule personne extérieure à le savoir. La jeune femme descendit les escaliers afin de se rendre dans la cour et releva la tête. Ah, la fameuse cour divisée en deux. Côté coréen et côté japonais, bien entendu, le coin adverse était à éviter. Pourtant, ce n’est pas vers le coin japonais qu’elle se dirigea, mais vers son opposé. Suicide ? Non, pas du tout. Vengeance. Depuis qu’elle s’était fait plaquer par le Japan King, il ne lui avait plus adressé la parole, chose qu’elle ne supportait tout simplement pas. D’accord, elle lui en voulait pour ce qu’il lui avait demandé et surtout fait après qu’elle ait avorté, mais elle voulait le voir justement à ce sujet. Elle avait fait ce qu’il avait demandé alors pourquoi la quitter ? Donc, meilleur moyen d’attirer son attention, parler avec la personne qu’il détestait le plus. C’est donc pour ça qu’elle voulait savoir où était Kan. Et au lieu de tourner en rond afin de le trouver, autant demander à un coréen. D’ailleurs, celui qu’elle aborda fut autant surpris que les japonaises se trouvant de l’autre côté de la cour.

Elle entama la conversation, voulant au plus vite la finir et alors qu’elle lui demandait où se trouvait l’acteur et qu’il commençait à lui répondre, elle sentit quelqu’un agripper son bras et la trainer de force un peu plus loin. Sayumi allait répliquer quand elle reconnut cette même personne qui l’avait trainé sur plusieurs mètres. Son ex, ou plus précisément, Shiro Yamazaki. Elle dégagea son bras et recula d’un pas, l’écoutant parler, enfin parler, vociférer était peut-être un meilleur mot. Tout ce qu’elle avait eu envie de lui dire, tous ces mots qu’elle avait retenu en elle, tout cela venait de s’évaporer rien qu’à l’entente de sa voix. Sauf qu’elle tiqua sur son ton. Non mais oh, il n’avait pas à lui parler comme ça. D’ailleurs, elle attendit qu’il finisse avant de répliquer.

« On ne t’as jamais appris à ne pas brutaliser les filles ? » siffla-t-elle, en se massant le bras là où il l’avait attrapé. Elle jeta un regard à son bras en grimaçant, c’est qu’il lui avait fait quand même un peu mal, elle était quasi-sur d’avoir un bleu.

Qu’est-ce qu’elle fabrique ? Voyons chéri, tu ne vois pas que tu viens de m’interrompre en pleine partie de squash avec ce coréen ? Quelle question, franchement.

« Ça se voyait pourtant, non ? J’étais en train de lui parler, je lui demandais où était Kan. » dit-elle en insistant bien sur le prénom de l’acteur.

Elle savait qu’il le détestait, oh oui, elle le savait même très bien pour avoir tenté de le calmer maintes et maintes fois après leurs rencontres, bien que non voulues, dans l’université. Alors, elle savait qu’en parlant avec lui, elle attirerait surement l’attention du Japan King, et elle avait eu raison. Enfin. Enfin, il lui avait adressé la parole depuis ce jour où il lui avait annoncé qu’il voulait qu’ils se séparent.

« Alors, il aura vraiment fallu que j’aille chez les coréens pour que tu te souvienne de mon existence ? Pour que tu viennes me parler ? Incroyable, si j’avais su, j’aurais fait ça plus tôt. » souffla-t-elle.

La colère et l’amertume venaient de redescendre. Derrière tout ça, elle était blessée, blessée par son attitude et par ce qu’il avait fait et même si elle tentait de le cacher, devant lui, c’était bien dur de ne pas le montrer. Elle jeta un coup d’œil derrière elle, bien sur, tous étaient à l’affut du moindre mouvement de leurs parts. Un Japan King et une Queen se disputant, et qui de plus avait été un couple il y a quelque temps, cela donnait envie d’en savoir plus. Son attention retourna à Shiro, elle soupira et croisa ses bras sur sa poitrine, attendant qu’il réagisse.

Shiro bouillonnait vraiment de l'intérieur. Depuis tout ce temps, il n'avait rien remarqué concernant Sayumi. Elle, en couple avec un Coréen, qui de plus était celui qu'il détestait depuis toujours ? Il n'arrivait pas à le croire, il n'avait rien vu arriver. Après, ce n'est pas comme s'il avait cherché à la voir, ou à avoir de ces nouvelles depuis le jour où il l'avait quitté. Mais tout de même, fallait pas dépasser les bornes non plus, comment avait-elle osé ? C'était juste une évidence, qu'elle cherchait à se venger, qu'elle cherchait à l'énerver, ben là c'était drôlement réussit. Une fois éloigné, il lui demanda clairement, d'un ton très sec, ce qu'elle foutait avec ces Coréens. C'est vrai quoi, depuis quand passait-elle du temps de l'autre côté ?? "On ne t’as jamais appris à ne pas brutaliser les filles ?" Tss, il n'était pas d'humeur d'engager un débat là-dessus, pour le moment il voulait des réponses, et rien que des réponses. "Ça se voyait pourtant, non ? J’étais en train de lui parler, je lui demandais où était Kan. " Aucun mot ne sortit de la bouche de Shiro, il se contenta juste de détourner le regard. Confirmation. Alors c'était vrai, elle sortait avec ce type. Non, il n'en revenait pas. Son cœur se serra dans sa poitrine. Le pire, c'est qu'elle le faisait exprès, cela se voyait, et il la connaissait. Vu comment elle avait bien insisté sur le prénom de l'acteur, Shiro avait bien remarqué que c'était une totale provocation. "Alors, il aura vraiment fallu que j’aille chez les coréens pour que tu te souvienne de mon existence ? Pour que tu viennes me parler ? Incroyable, si j’avais su, j’aurais fait ça plus tôt."

Yamazaki reposa les yeux sur la demoiselle. Non. D'accord. Il venait de comprendre. Sayumi avait machiné tout ce cirque pour récupérer son attention. Il roula des yeux et poussa un gros soupir. Ouf, elle ne sortait pas avec ce mec, c'était déjà merveilleux, à vrai dire, Shiro préférait ça. Sauf que là... Il se retrouvait dans une mauvaise situation. Il avait été prit au piège, la nipponne l'avait bien eu, et maintenant il ne pouvait pas s'enfuir. Il se retrouvait de nouveau face à elle, après il ne savait même plus combien de temps, et il ne lui restait plus qu'à faire le dialogue. Zut. Il soupira de nouveau en baissant la tête. Il reprit ensuite la parole, mais d'un ton bien plus doux par rapport à tout à l'heure.

-Sayumi... De toutes façons, qu'est-ce que tu veux que je te dise.

C'est vrai, dans le fond il ne savait même pas où se mettre. Il était juste gêné. Encore, s'il avait au moins préparé le coup... Mais là ça lui était tombé dessus. D'ailleurs, toutes ces personnes dans les alentours, qui avaient les yeux fixés sur eux, on aurait dit qu'ils se croyaient au cinéma. Quoi de mieux pour faire péter les plombs à Shiro. Il se tourna vers eux et s'exclama :

-C'est quoi votre problème, vous voulez notre photo ?!

Ils détournèrent le regard et certains allaient même voir ailleurs s'ils y étaient. Tant mieux. Il se tourna de nouveau vers Sayumi et poussa son énième soupire. Décidément, ce n'était pas son jour. Il plongea son regard dans le sien, cherchant toujours quelque chose à dire, mais c'était le néant dans sa tête. Ou presque. Car les souvenirs commençaient à fuser. Sayumi qui lui disait qu'elle était enceinte. Lui qui pétait les plombs et qui lui disait d'avorter. La douleur qu'elle avait ressentit, et le sacrifice qu'elle avait fait en obéissant. Et avec tout ça, il avait décidé de la quitter. Pourquoi ? Oh, il ne voulait même pas y penser. Bien sûr qu'elle était encore dans son cœur, mais c'était si compliqué...

-Tu devrais faire attention à ce que tu fais. Trainer dans le coin Coréen comme ça, tu risques de te faire cataloguer facilement... Les gens commencent à raconter que tu es en couple avec Kan, tu te rends compte un peu ? Bref, ne fais plus ça.

Un blanc s'installa entre eux, et il reprit la parole.

-Et ne dis pas de bêtises, je n'ai jamais oublié ton existence.

Il avait dit cette dernière phrase sans la regarder. Puis il se retourna et commença à s'éloigner. Fuir, fuir, fuir. S'il restait encore quelques minutes avec elle, il perdrait certainement tous ses moyens.

La jeune femme voyait bien que Shiro était plus qu’énerver et une part d’elle-même s’en réjouissait ; cela voulait dire qu’elle avait réussi à récupérer son attention et c’était ce qu’elle voulait depuis le jour où il avait rompu et qu’elle n’avait eu aucune explication. Là, elle avait enfin l’occasion de l’avoir en face, elle ne le laissera pas se défiler aussi facilement. Ils avaient l’air de vouloir tous les deux des réponses, sauf que le sujet n’était sans doute pas le même et elle, elle n’avait pas clarifié ses intentions, même s’il devait s’en douter. Sayumi eut tout de même une part de remords lorsqu’elle vit l’expression de son visage changer à l’entente du nom de Kan, elle venait de le blesser et même si elle avait réellement envie de se venger, cela lui fit un pincement au cœur de le voir réagir comme ça. Elle le connaissait assez bien pour savoir qu’elle venait de lui faire mal sans même qu’il n’ait eu besoin de lui dire.

Mais ces dernières paroles avaient l’air de le rassurer. Le rassurer sur quoi ? Qu’elle avait fait tout ça pour pouvoir lui parler, qu’elle avait intentionnellement approché les coréens pour retenir son attention. En effet. C’était seulement pour lui. Elle attendit patiemment qu’il finisse d’exprimer son soulagement, rien que de le voir, elle pouvait se souvenir de toutes ses manies, des expressions qu’il abordait lorsqu’il était face à quelque chose. Elle qui avait été si remonté contre lui pendant un certains temps, toute cette colère n’était plus qu’une ombre, il n’y avait que l’envie de savoir pourquoi il l’avait quitté comme ça. Elle s’était remise en question ; est-ce qu’elle avait fait quelque chose de mal ? Pourtant, elle lui avait obéi, elle n’avait même pas cherché à discuter ses ordres, elle avait avorté, elle en avait souffert, mais elle n’avait rien dit. Entendant sa voix, sur un ton bien plus doux que ces vociférations d’il y a quelques minutes, elle sentit son cœur se serrer et les souvenirs remonter en flèche. Rien que de l’entendre prononcer son nom la faisait chavirer comme avant.

Elle sursauta légèrement lorsqu’il remit à sa place ses voyeurs d’universitaires qui se croyaient en plein épisode d’une téléréalité. Inconsciemment, mais surtout par habitude, elle ne put s’empêcher d’intervenir.

« Calme-toi Shiro » dit-elle, doucement. « Ils se lasseront. »

Combien de fois elle l’avait calmé lorsqu’il était énervé ? Principalement contre Kan, en plus. Elle ne les comptait même plus. Elle soupira, décidément le jeune homme venait de la contaminer avec sa symphonie soupirs. Croiser son regard n’était peut-être pas une très bonne idée. Elle n’avait qu’une envie, c’était de se coller contre lui et de rester là, à ne rien faire, juste être comme ça, ne penser à rien. Elle n’avait pas que les derniers moments passés avec lui qui revenaient, ceux là étaient revenus tellement souvent. Non. À cet instant, elle ne se souvenait que des bons moments qu’ils avaient passés ensemble, d’ailleurs elle n’aurait aimé qu’il y ait que ça. Elle ne pouvait pas le nier, elle l’aimait encore et elle avait et aurait beaucoup de mal à faire table rase de ses sentiments pour lui.

Elle en fut presque choquée lorsque celui-ci lui dit que les gens croyaient qu’elle était en couple avec Kan. Si la situation n’était pas aussi tendue, elle aurait surement éclaté de rire. Elle ne put s’empêcher de répliquer en souriant très largement, incapable de contenir son hilarité.

« Pardon ? En couple avec No Kan ? J’espère que tu rigoles … moi en couple avec un coréen, tu y as vraiment cru ? » Elle soupira en roulant des yeux. « Ils ne savent vraiment plus quoi inventer. »

Elle avait beau avoir voulu se venger de son ex, elle ne se serait jamais mise en couple avec un coréen, même si c’est la personne qu’il déteste le plus. Elle avait sa fierté tout de même, ils ne faisaient que parler, de toute façon, même s’il ne venait plus lui parler d’un jour à l’autre, elle ne s’en soucierait pas vraiment, ils ne sont pas vraiment amis. Un grand silence s’installa entre eux deux. Elle ne savait pas quoi dire, ou plutôt par quoi commencer. Finalement, c’est lui qui reparla le premier. Concentrée sur ses chaussures pendant le silence, elle releva la tête vers lui, bien qu’il ne le regardait pas. Ah oui ? Bizarrement, c’était tout comme. S’ils se croisaient, il ne lui adressait même pas un regard, il n’avait fais que fuir, refusant de lui parler. D’ailleurs, c’est ce qu’il tenta de faire à l’instant, juste après ces quelques mots, il venait de se retourner pour s’éloigner. Non ça elle ne pourrait pas le supporter. Lui tourner le dos de la sorte … elle avait l’impression de revenir au jour de leur rupture. Elle n’avait pas envie de souffrir une deuxième fois.

Elle suivit ses pas et lui attrapa doucement le poignet, le stoppant dans sa fuite et le forçant un peu à se retourner vers elle.

« Shiro … ne pars pas, arrête de fuir comme ça. » Sayumi soupira et regarda sa main, elle tenait toujours le poignet de Shiro et elle n’avait pas du tout envie de le lâcher, mais elle le fit quand même. « Tu as fais comme si je n’existais pas depuis … depuis tout ce temps, tu n’as fait que fuir … pourquoi ? Qu’est-ce que je t’ais fait ? J’ai … j’ai fais quelque chose de mal ? »

Elle voulait comprendre, juste comprendre. Quand il était en face d’elle, elle lui pardonnait pratiquement tout et cette fois-ci ne fit pas exception.

Même ses petites habitudes n'avaient pas changer. Autrefois, quand ils étaient encore un couple, chaque fois que Shiro s'énervait elle était toujours là pour le calmer. Mais après tout, ne disait-on pas que la curiosité était un vilain défaut ? C'était quoi leur problème à ces gens, c'était pas Secret Story ici. D'ailleurs, Shiro avait pour horreur que ses affaires privées faisait le tour de l'université. Ce journal qui publiait tout ce qui se passait à Ayes, et qui faisait donc tout savoir aux gens de l'extérieur et même en Corée, cela lui faisait juste péter les plombs, il avait tout le temps l'impression d'être surveillé. "Pardon ? En couple avec No Kan ? J’espère que tu rigoles … moi en couple avec un coréen, tu y as vraiment cru ?" C'est vrai que quand on y pensait, c'était assez absurde. Mais la façon dont son pote le lui avait annoncé... Il y avait de suite cru. Heureusement que ce n'était qu'une sale plaisanterie, une fausse rumeur. Mais il fallait quand même veiller à ce que cela ne se raconte plus dans l'établissement...

C'est vrai, Shiro n'avait jamais oublié l'existence de sa dulcinée. Comment aurait-il put après tout. Ses sentiments pour elle étaient réels. Cela lui faisait mal que la jeune fille dise ce genre de choses... Mais en même temps il ne voulait pas trop la rassurer, de peur que quelque chose recommence entre eux. Voilà pourquoi il avait dit ces simples mots. S'il avait put faire ou dit autre chose, il n'aurait pas hésité. Mais quelque chose le retenait. Pour lui, au fond de son cœur, ce n'était pas possible. Alors qu'il se retourna et commença son chemin, il sentit une main saisir son poignet. "Shiro … ne pars pas, arrête de fuir comme ça. " C'était à prévoir, à vrai dire, il s'y attendait. Le jeune homme s'arrêta sans pour autant se retourner, alors qu'Egawa lâcha sa main et continua ses paroles. "Tu as fais comme si je n’existais pas depuis … depuis tout ce temps, tu n’as fait que fuir … pourquoi ? Qu’est-ce que je t’ais fait ? J’ai … j’ai fais quelque chose de mal ? " Ca, c'était juste la question qu'il ne voulait pas entendre. Il ferma les yeux en baissant la tête. Après quelques secondes de silence, il se décida à parler.

-Tu fais comme si de rien n'était... Mais tu sais ce qui est arrivé entre nous.

Il se tourna à moitié vers elle, le regard dans le vide, se passant une main dans les cheveux. Autant en finir maintenant... Au moins la rassurer quelque peu, chasser cette peine qu'il avait planté en elle, si cela était possible.

-Tu n'as rien fais Sayumi. Tu n'as rien fais de mal, bien au contraire... Mais... Avec ce qui est arrivé, je me sens mal. Je ne veux même pas qu'on en discute.

Si au moins il savait ce qui se passait à l'intérieur de lui, cela aurait peut-être été plus facile. Pour faire le tri, il l'aimait. Mais à l'heure actuelle, il se sentait coupable, énormément coupable de tout ce qui était arrivé. Qu'elle tombe enceinte, et qu'il lui ordonne d'avorter comme ça, sans aucun état d'âme, si ce n'était la colère dans ses yeux. Comme si c'était de sa faute à elle, et que lui n'y était pour rien. Elle, avait avorté, avait ravalé sa peine et s'était dit tant pis. Tout ça par amour. Shiro était conscient du mal qu'il lui avait fait à ce moment là. S'il pouvait remonter le temps, il aurait certainement tout corrigé... Pourquoi avait-il fallut que cet accident arrive alors que tout allait si bien ? Son cœur se déchirait avec cette décision qu'il avait prise en la quittant, il avait eu trop honte, il s'était sentit trop sale devant elle, il avait considéré qu'il ne la méritait plus, qu'il aurait été incapable de la faire sourire après cet incident. Il était le causeur de trouble dans ce couple. Il ne voulait plus de ça. Il l'aimait, mais ne voulait plus la voir.

-Je n'aurais pas dut... C'est moi qui ai tout gâché, voilà tout. Je n'ai pas cherché à comprendre tes sentiments, et même ce que tu as put ressentir en avortant... J'ai été égoïste, et je n'ai pensé qu'à moi, comme d'habitude. Je ne pensais qu'au scandale que ça ferait si ma famille apprenait que j'avais enceinté quelqu'un... Les médias, tout ça... Je ne voulais pas de problèmes.

Il posa enfin ses yeux sur elle et continua :

-En même temps, je ne veux pas m'excuser. Parce que je considère que ce que j'ai fais est impardonnable... Je ne veux même pas que tu me pardonnes. Je ne te mérite pas Sayumi.

Le pardon est l’une des choses indispensables à un être humain blessé, pour continuer à vivre. Même si cela fait mal, même si on se souvient, car on se souvient toujours, il y a des choses qu’on ne peut pas oublier, mais on pardonne, car après tout l’homme est faible. Il ne veut pas faire de mal à la personne qui l’a blessé et en lui pardonnant, il évite de se faire du mal à lui-même; car faire mal à une personne que l’on aime est définitivement quelque chose de douloureux. Sayumi avait eu beaucoup de mal à pardonner à Shiro et d’ailleurs, elle n’était même pas sur de lui avoir totalement pardonné. Ce qu’elle savait, c’était qu’elle l’aimait toujours, elle l’aimait comme au premier jour. Lui en vouloir toute sa vie n’arrangerait sans doute en rien les choses et elle finira par se détester elle-même de ne pas lui avoir accordé son pardon.

Pourtant tout dans son attitude ne tendait pas vraiment à ce qu’elle lui pardonne. Il la fuyait, il ne voulait pas parler, il ne voulait pas en parler et il ne voulait pas lui parler. Elle s’en était bien rendu compte, rien qu’à la façon dont il l’avait quitté, sans aucune explication, sans même pouvoir la regarder en face. À un moment, elle s’était même demandée si elle si détestable que ça pour qu’il ne la regarde même plus. Elle avait souffert, elle aurait tellement voulu qu’il reste. Ce n’est pas vraiment le fait qu’il l’oblige à avorter qui l’avait plus choqué à l’époque, non. Elle avait cru qu’après ça, il l’aurait soutenu, avorter n’est pas l’une des choses les plus agréables qu’il soit, mais elle avait pensé qu’il serait là. Et non, il l’avait abandonné à un des pires moments de sa vie, il l’avait laissé seule à un moment où elle avait eu désespérément besoin de lui, de son soutien.

C’est pour ça qu’elle tiqua à ses paroles. Il avait tord, elle se souvenait parfaitement de chaque moments, elle n’avait jamais oublié.

« Je n’ai jamais fais comme si de rien n’était … j’ai juste … grandi, muri. J’ai appris de cette erreur et je m’en souviendrais toute ma vie. Je ne pourrais jamais oublier Shiro. Je ne pourrais jamais oublier ce qui s’est passé, ce qui est arrivé. » Elle soupira. « Je ne pourrais jamais nous oublier. » murmura-t-elle si doucement qu’elle ne savait même pas si il l’avait entendu.

Même si un avenir entre eux était plus qu’incertains, elle ne pourrait sans doute jamais faire une croix sur lui, lui faire débarrasser le plancher de ses souvenirs, elle ne pouvait tout simplement pas. Pourtant au début, ce n’était pas l’envie qui lui manquait. Oh oui, bien sûr, elle avait pleuré, elle ne comptait plus les fois où elle avait appelé Anna ou s’était réfugiée chez elle, mais avant tout ça, elle avait été en colère. Elle l’avait haït, détesté de tout son être. Elle l’avait trouvé égoïste, il n’avait même pas pensé à elle, à ce qu’elle pourrait ressentir. Savoir qu’il s’était senti mal partagea son cœur et sa conscience, la dernière était contente de savoir qu’elle n’avait pas été la seule à souffrir, mais son cœur … elle ne pouvait résolument pas se résoudre à apprécier le fait qu’il est souffert.

Elle préféra ne pas répondre, elle voulait entendre ce qu’il avait à dire, pour une fois qu’il lui parlait. En fait, c’était tout simplement la première fois qu’ils se reparlaient depuis qu’ils avaient rompu. Leur discussion lui apportait finalement ce qu’elle avait entendu, quelques réponses, quelques explications. À ce qu’il venait de dire, elle ne put s’empêcher de prendre la parole, elle voulait qu’il sache qu’il l’avait blessé en agissant de la sorte.

« Oui tu as été égoïste … tu as été égoïste de me quitter sans me donner aucune explication Shiro. Tu as été égoïste de ne pas être restée alors que j’avais … alors que j’avais besoin de toi. Tu sais, au début je t’ai détesté, je t’en ai énormément voulu et puis ensuite, je me suis dit que j’étais fautive de ne pas avoir su te retenir. Je suis même allée jusqu’à me détester et à me remettre en question. » Et ça, c’était seulement grâce à Anna qu’elle avait pu remonter la pente. Elle continua. « Tu n’as pas pensé à moi, mon nom aurait été autant éclaboussé par le scandale que le tien dans la presse et mes parents n’auraient surement pas été enchantés non plus. »

Elle se stoppa, elle ne voulait pas parler de ce qui aurait pu se passer si cette grossesse avait été rendu publique puisque cela ne l’a pas été. Et c’était tant mieux, de toute façon, même si tout le monde avait été enchanté par la nouvelle, elle n’aurait pas été prête et Shiro non plus d’ailleurs, vu sa réaction assez violente lorsqu’elle lui avait appris la nouvelle. Alors qu’il posa les yeux sur la jeune femme, elle croisa son regard et elle dut se retenir pour ne pas le serrer contre, elle détestait le voir comme ça, c’était tout bonnement insupportable. On pouvait dire que toute colère avait disparu, c’était si dur de le détester alors qu’il était juste devant elle et qu’il montrait à quel point il regrettait. Lui dire qu’il ne la méritait pas lui fit énormément de peine, elle avait pensé la même chose d’elle.

« Arrête. Ça suffit, ne dis pas ça. Tu me connais Shiro, je suis peut-être rancunière et quand on me fait autant de mal que toi tu m’en as fait, j’ai beaucoup de mal à pardonner, mais toi … toi c’est différent. Tu sais, je ne pourrais pas te regarder droit dans les yeux et te dire que je ne te pardonnerais jamais, car je mentirais. » Elle ne savait pas si elle arriverait à lui dire qu’elle l’aimait encore, elle ne voulait pas se faire envoyer paître, elle ne le supporterait pas. Pas une deuxième fois. « Au final, on en est tout les deux à penser qu’on ne se mérite pas… on ne va pas vraiment avancer comme ça. » souffla-t-elle.

De toutes façons, pour Shiro c'était clair, tant que ce travail en lui n'était pas terminé, pour tout oublier et recommencer à zéro, il ne pourrait recommencer quoi que ce soit avec elle, même s'il l'aimait. Il lui avait dit clairement qu'il ne voulait pas se pardonner, peut-être parce que c'était encore trop récent à son goût ? Il n'en savait trop rien, le fait restait tout de même grave, et son cœur n'en était pas encore rétablit. "Je n’ai jamais fais comme si de rien n’était … j’ai juste … grandi, muri. J’ai appris de cette erreur et je m’en souviendrais toute ma vie. Je ne pourrais jamais oublier Shiro. Je ne pourrais jamais oublier ce qui s’est passé, ce qui est arrivé. " Comment cela serait possible de toutes façons. Même des années plus tard, lui aussi se souviendrait certainement de cette histoire. De l'enfant qu'il aurait put avoir, une fille peut-être, ou un petit garçon, il se demanderait quelle tête est-ce qu'il aurait bien put avoir, et surtout de Sayumi qu'il avait tant blessée. "Je ne pourrais jamais nous oublier." Shiro baissa les yeux. En vérité, il se demandait, si lui, il le pouvait.

Est-ce qu'un jour, il serait capable d'oublier Sayumi, et d'avoir des sentiments pour une autre fille ? Avant elle, il avait déjà été amoureux, mais pas comme ça. En fait, il ne s'était jamais posé la question. "Oui tu as été égoïste … tu as été égoïste de me quitter sans me donner aucune explication Shiro. Tu as été égoïste de ne pas être restée alors que j’avais … alors que j’avais besoin de toi. Tu sais, au début je t’ai détesté, je t’en ai énormément voulu et puis ensuite, je me suis dit que j’étais fautive de ne pas avoir su te retenir. Je suis même allée jusqu’à me détester et à me remettre en question." Le coeur du JKing se serra. Ces paroles étaient bien plus douloureuses qu'une bonne claque. Elle confirmait qu'elle avait vraiment souffert, et qu'il s'était vraiment comporté comme un égoïste, comme il l'avait dit. Mais venant de la bouche de celle qu'il aimait, ça lui faisait... bizarre. Mal. "Tu n’as pas pensé à moi, mon nom aurait été autant éclaboussé par le scandale que le tien dans la presse et mes parents n’auraient surement pas été enchantés non plus. " Ce n'était pas faux, et maintenant qu'il le pensait, il n'aurait jamais supporté que le nom de Sayumi soit salit, qu'elle aie des problèmes avec sa famille à cause de cette grossesse. Il n'aurait jamais supporté qu'on crache sur elle.

Tout ça résumait la situation, Shiro ne la méritait vraiment pas. Il lui avait fait trop souffrir, depuis quand fait-on souffrir celui ou celle qu'on aime ? D'accord, ce n'était pas ce qu'l voulait dans le fond, mais il ne pouvait pas revenir en arrière... "Arrête. Ça suffit, ne dis pas ça. Tu me connais Shiro, je suis peut-être rancunière et quand on me fait autant de mal que toi tu m’en as fait, j’ai beaucoup de mal à pardonner, mais toi … toi c’est différent. Tu sais, je ne pourrais pas te regarder droit dans les yeux et te dire que je ne te pardonnerais jamais, car je mentirais." De suite, le jeune homme plongea son regard dans celui de la jeune fille, sans pour autant écouter ce qu'elle racontait à la suite. Il avait sentit à l'intérieur de lui, comme une petite étincelle se réveiller. Il resta, un petit moment ainsi, sans rien dire, sans rien faire, juste la regarder. Puis un petit sourire se dessina sur ses lèvres, alors qu'il se mit dos à elle.

-Tu es mignonne, comme toujours. Malgré tout... Tu ne changes pas.

Il la connaissait bien cette jeune fille ça oui. Il l'avait connue chiante, capricieuse et même très jalouse, mais les mots qu'elle disait de temps en temps avaient le don d'apaiser le Japan King, et c'était l'une des choses qu'il aimait le plus chez elle. Sayumi ne changeait pas. Même dans de telles circonstances, après avoir subit ce qu'elle ne méritait pas, elle restait la même. Il était dingue d'elle.

-Je ne peux pas croire que tu puisses me pardonner à l'heure actuelle, tu le dis mais ce n'est pas vrai. Inconsciemment, tu me détestes. Ne prends pas ça comme un reproche... Mais, je pense qu'on ne devrait pas se précipiter comme ça.

Shiro préférait faire la part des choses, et surtout, prendre son temps. Bien sûr il voulait l'embrasser, la serrer dans ses bras, repasser des nuits avec elle, mais, après tout ce qui était arrivé, c'était beaucoup trop tôt.
Il se tourna de nouveau vers elle.

-Je suis heureux de savoir ce que tu penses de tout ça, et que tu aies été honnête. Mais en ce qui me concerne... J'ai peut-être besoin d'un nettoyage. De prendre mon temps... Laisse-moi du temps.

Il se passa une main sur la nuque, le regard un peu dans le vague.

-Un jour, je reviendrais.

Il se détourna, puis commença son chemin pour aller dans l'université. Voilà, tout était dit, de chaque côté. Il se sentait un peu mieux de savoir ce qu'elle pensait. Cette discussion lui avait au final, fait du bien.